Démarche

J’ai œuvré en travail social et en adoption durant plusieurs années ; j’ai aussi enseigné et écrit deux livres sur la théorie de l’attachement qui explore le processus par lequel les enfants créent un lien avec les adultes prenant soin d’eux : la qualité de ce lien est cruciale au développent de l’empathie et de relations significatives plus tard.

Pour des raisons à la fois personnelles et professionnelles, le concept de l’attachement est un fondement central de mon travail artistique.

Je suis également profondément intéressée par les continuums auxquels nous participons tous, non seulement le continuum vertical entre les générations — grands-parents, parents, enfants —, mais aussi le continuum horizontal entre les différents organismes de la Terre.

Les modes d’interaction entre la société humaine et la nature sont complexes et multiples : nous comptons tous les uns sur les autres — le concept de « l’individu self-made » est une fiction.

La solidarité est essentielle à notre bien-être, à notre survie, mais est souvent mise à l’épreuve par les conflits toujours présents dans la vie.

Mon travail exprime un large éventail d’émotions liées à la complexité de la condition humaine.

Il existe dans un espace entre la représentation et l’abstraction où certains éléments sont plus facilement reconnaissables alors que d’autres sont usés, abîmés, déformés, brûlés ou enfouis.

Mon choix de matériaux, d’approches et de méthodes actualise un récit visuel lié à l’attachement et à la relation, à l’absence, à l’éloignement et à la perte.

Je superpose et j’entrelace les médiums, les substances, les textures et les couleurs ; j’utilise des vêtements abandonnés et réutilisés, du tissu, des plantes, du métal et des objets trouvés… brouillant les frontières entre la peinture et la sculpture pour créer un souvenir, une expérience, une contribution à notre aventure humaine commune.

Je suis consciente du caractère sacré des matériaux trouvés qui ont appartenu à autrui et de l’existence qu’ils ont eue avant d’arriver entre mes mains ; j’écoute et je travaille en collaboration avec eux : créer « à quatre mains » enrichit mon processus.

Avec sa gamme d’expressions allant du dessin à la peinture, à l’assemblage et à l’installation, mon travail participe aux continuums et à la circularité, aux processus de mutation et de renouvellement de l’univers : « Le paradoxe de la condition humaine est que l’on ne peut devenir soi-même que par l’influence des autres. » (Boris Cyrulnik)

Photographie : Alain Lefort